L’intelligence artificielle investit rapidement tous les domaines de la formation, parmi lesquels ce qui relève de la confrontation et de la validation des savoirs. Partie intégrante de son plan des innovations pédagogiques et digitales, Safran University déploie un module de conversation simulée à base d’intelligence artificielle. Retour d’expérience sur ce projet précurseur qui en annonce bien d’autres…
L’arrivée de l’IA générative en formation : le rôle de l’apprenant
Des échanges entre responsables formation (œuvrant dans le club des « learning activists ») ont permis de mettre en évidence des cas usages de l’Intelligence Artificielle appliquée à la formation, grâce à la transposition de la matrice de Dave Ulrich (la matrice propose une approche par rôle, fort utile pour identifier et tester divers cas d’usage dans le domaine de la formation). L’apprenant se voit attribuer le rôle de « client ultime de la formation », celui qui pose des questions et reçoit un soutien personnalisé tout au long de son parcours de formation ; l’IA offre alors un terrain de jeu et d’entraînement illimité, pour confronter et valider les savoirs.
Illustration : les prompts utilisés lors de nos premières utilisations de ChatGPT ont structuré un dialogue pas-à-pas (conversation simulée) entre un manager (l’apprenant) et un collaborateur (joué par l’IA) sur un problème de gestion quotidienne des priorités. Le prompt donnait également des précisions sur les prérequis nécessaires à l’apprenant-manager (par exemple, matrice d’Eisenhower, outils d’analyse et de gestion du temps et priorités des tâches en cours) et demandait un retour personnalisé de type « RAS » (Réussites, Améliorations et Suggestions)… En définitive : des résultats impressionnants !
Contextualisation des apprentissages : les conversations simulées à base d’IA
La mise en œuvre à grande échelle de la confrontation et de la validation des savoirs en environnement sécurisé s’est appuyée sur le principe des conversations simulées à base d’intelligence artificielle, répondant aux contraintes de sécurité et de RGPD en vigueur chez Safran. Ces conversations simulées s’appuient sur des « arbres de décision » construits à partir d’un référentiel de compétences prédéfinis : on parlera « d’IA de filtrage » au sens où, selon les mots utilisés par l’apprenant, la bascule s’effectue sur telle ou telle branche donnée pour déverrouiller la branche suivante, et ainsi de suite. L’expérience s’est enrichie des ressources (voix off, avatar, etc.) générées par l’IA générative pour mieux simuler l’environnement dans lequel se tenait l’expérience. Last but not least, le socle de compétences défini lors de la phase d’ingénierie pédagogique a renforcé la dimension pédagogique du dispositif, par l’introduction d’une évaluation et d’une mesure objective des apprentissages.
Conception et déploiement à grande échelle : leçons apprises
Le dispositif qu’on vient d’évoquer a servi un parcours de formation certifiant pour les acheteurs de Safran, parcours intégré dans la plateforme de Digital Learning de l’entreprise. Comme « coach d’entraînement », il prépare l’apprenant au quiz final. Les premiers retours sont positifs, notamment en matière d’interaction et de personnalisation offerte par l’intelligence artificielle via une conversation proche du réel, contextualisant fortement des apprentissages par ailleurs ludiques et d’un suivi engageant.
Parmi les leçons apprises à ce jour :
- La dimension objective de l’évaluation avec un avantage significatif s'agissant des biais potentiels si l’on se trouvait face à une personne réelle ;
- Le gain très important en matière de déploiement massif compatible avec une personnalisation des apprentissages et la possibilité de s’entraîner plusieurs fois (répétition) avant de lancer dans le quiz final ;
- L’importance de cibler la problématique pour concevoir un arbre spécifique. Fondés sur des conversations plus ouvertes, nos premiers tests se sont avérés peu pertinents et non fonctionnels ;
- L’optimisation de l’authenticité de la conversation simulée. Il est préconisé d'intégrer des réponses de remplissage et de recentrage (par exemple : « pouvez-vous répéter la question ? »). Cette approche vise à rendre les échanges plus fidèles à la réalité ;
- Le modèle économique de l’innovation et ses composantes « design » (outil-auteur et temps d’accompagnement) et « run » (système de jetons) est à considérer dès le début pour assurer un déploiement et une industrialisation réussis, car il peut constituer un obstacle.
Avec l’aimable contribution d'Imane El Khattabi et de Matthieu Esteve.
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